mardi 27 janvier 2015

« Idomeneo » de Wolfgang Amadeus Mozart - Opéra de Lyon - 23/01/2015


On aura beau dire que mettre en scène Idoménée relève d’une gageure, force est de constater que le travail de Martin Kusej n’a pas convaincu vendredi soir lors de la première à Lyon. Déjà copieusement huée à Londres en fin d’année dernière, cette production a reçu le même accueil dans la capitale des Gaules. Le metteur en scène autrichien aura au moins eu le courage de monter sur scène pour affronter le mécontentement, écartant ses collaborateurs pour avancer seul face à la rampe et faire signe au public de sa seule responsabilité face à l’échec.

Tout avait pourtant bien débuté, Kusej ayant la bonne idée de faire venir un à un les esclaves troyens pendant l’Ouverture, tout juste avant l’air initial d’Ilia, la princesse troyenne. Une entrée en matière saisissante avec ces hommes en haillons, dévastés par la défaite de leur camp face aux Crétois. Mais très vite, le statisme s’installe autour d’une mise en scène minimaliste qui cultive le noir et blanc et le peu d’effets visuels. Un plateau tournant en arrière-scène permet de voir des personnages s’agiter au loin pendant que les chanteurs semblent tourner en rond au premier plan, faute de réelle direction d’acteurs. En transposant le récit au milieu du XXe siècle, Kusej imagine un Idoménée de retour sur ses terres non plus pour offrir son fils Idamante en offrande à Poséidon mais pour reprendre le pouvoir que ce fils lui aurait substitué. Une idée intéressante, en lien avec les sources historiques du livret, malheureusement insuffisamment convaincante dans les deux premiers actes (donnés à la suite), qui paraissent bien longs, faute d’action. Il aurait sans doute fallu davantage d’imagination pour éviter cette désagréable impression d’une mise en espace établie à la va-vite. Seul le dernier acte apporte davantage de satisfaction avec les mouvements du chœur parfaitement maitrisés et plus encore l’image marquante d’Idoménée à terre après son ultime monologue, piétiné par une foule ivre du succès d’Idamante.


Au niveau interprétatif, on retiendra surtout l’impeccable Ilia d’Elena Galitskaya, vivement applaudie à l’issue de la représentation. La soprano russe impose un chant rayonnant, parfaitement en place et idéalement projeté. A ses côtés, Kate Aldrich (Idamante) offre une belle musicalité, en phase avec la subtilité de son interprétation dramatique. On ne lui reprochera qu’un léger vibrato, assez gênant dans les airs. Autre belle prestation avec l’Idoménée de Lothar Odinius, émouvant dans sa dernière scène, mais parfois un peu tonitruant avec sa voix puissante qui n’évite pas quelques passages en force. Très applaudi, le Lyonnais Julien Behr (Arbace) assure son rôle mineur avec aisance, tandis qu’Ingela Brimberg déçoit en Electre. Un rôle visiblement trop lourd pour la soprano suédoise, au timbre métallique, en lutte constante pour remplir sa partie – alors qu’elle était tellement plus à son aise en Leonore à Verbier l’an passé.


Un plateau vocal en demi-teinte malheureusement desservi par une direction uniforme, trop carrée, ne retenant que la fureur au détriment de tout moment de grâce. Le geste rageur de Gérard Korsten dans l’Ouverture avait aussitôt donné le ton, impressionnant de noirceur mais bien usant à la longue. Dommage car l’Orchestre tout comme le Chœur de l’Opéra de Lyon s’avèrent tous deux très affutés, sauvant la soirée par leur engagement constant.

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